Le Musée national du Tim Hortons ouvre ses portes à Hochelaga-Maisonneuve
Nicholas De Rosa
Nicholas De Rosa
Vendredi, 7 juillet 2017 12:20
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Vendredi, 7 juillet 2017 12:20
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Lancé il y a à peine quelques semaines dans un appartement d’Hochelaga-Maisonneuve, le Musée national du Tim Hortons, dont la collection compte une soixantaine d’objets, propose de nous faire réfléchir au rôle qu’occupe l’empire caféiné dans la culture et l’identité canadienne.
Gobelets, assiettes, cafetières, uniformes et produits dérivés remplissent la pièce blanche improvisée en musée pour l’occasion. Des publicités de diverses époques jouent en boucle sur un ordinateur portable installé dans un coin. Une croix et deux chandelles sont flanquées à côté de la photo du cofondateur de la chaîne, le hockeyeur Tim Horton.
«Tu peux manipuler les objets, ici. Gêne-toi pas», me dit Alexandre Contant, étudiant en arts visuels et cofondateur du Musée national du Tim Hortons.
J’acquiesce et m’empare d’un livre où sont préservés divers manchons, tous conçus pour souligner des occasions ou évènements canadiens importants, comme le temps des Fêtes ou le 150e anniversaire de la Confédération. «Il y en a un qui est un don du Tim Hortons de New York. Quelqu’un y est allé et nous l’a ramené», m’explique Alexandre Contant.
Je rigole un peu. Je trouve l’expérience un peu absurde, et je ne peux m’empêcher d’avoir un feeling bizarre en scrutant tous ces objets comme s’ils avaient une valeur quelconque. D’accord, c’est drôle que le Timopoly, un dérouleur de rebord et des boucles d’oreilles à l’effigie du cappuccino glacé existent, mais pourquoi y consacrer un musée?
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La collection de manchons et de cartes-cadeaux du Musée national du Tim Hortons.
Culture canadienne
Après ma brève visite à la Mecque de l’artéfact cheap, je voulais mieux comprendre ce qui avait poussé Alexandre et sa copine, l’étudiante en muséologie Lorie-Anne Chamberland, à ouvrir ce musée. Peut-être était-ce à cause de leur amour inébranlable pour les cafés à la fausse vanille française garnis de crème fouettée? Non.
«On était au Village des Valeurs, on cherchait une cafetière pour notre nouvel appart et on est tombés sur une de celles qu’on voit dans le musée. C’est là qu’on s’est dit qu’on pourrait aussi avoir une table, des chaises et des tasses Tim Hortons pour l’accompagner», raconte Alexandre.
«On a ensuite eu l’idée de transformer notre cuisine pour qu’elle devienne un genre de musée Tim Hortons. On se disait à la blague qu’il serait drôle de pousser l’idée au maximum, d’en faire un musée complet dans une salle à part. Finalement, on a choisi notre appartement en fonction de ça», poursuit Lorie-Anne.
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La collection de chapeaux d’employés du Musée national du Tim Hortons.
Cette décision a provoqué des discussions sur la relation qu’entretiennent les Canadiens avec l’entreprise, particulièrement en cette année du 150e. Leur conclusion: avec ses 4400 succursales, Tim Hortons est omniprésent au pays. Il fait partie du quotidien de bon nombre de Canadiens et est un lieu de rassemblement important.
Au-delà de tout ça, ils ont constaté que la chaîne vend ses produits en se servant du sentiment d’appartenance qu’il a su créer à travers son marketing en plus d’être porteur de la culture canadienne à l’international. «Est-ce que c’est bien ou mauvais, cette espèce de commercialisation de la culture? C’est à travers les objets qu’on peut y réfléchir», soutient Alexandre Contant.
Sans donner son avis sur la question, le directeur du département d’anthropologie de l’Université de Montréal et spécialiste de la culture populaire, Guy Lanoue, m’a partagé sa théorie qui explique l’importance de Tim Hortons dans le cœur des Canadiens.
«Le Canada n’a jamais eu une identité très bien développée, contrairement aux États-Unis avec le red, white and blue. On n’a pas cette même sorte de patriotisme. Il y a un donc un vide au niveau identitaire, et c’est Tim Hortons qui le remplit», dit-il.
Selon lui, l’entreprise a pu y parvenir en mettant de l’avant des éléments culturels qui jouent sur la conscience collective de la classe moyenne.
«Ils donnent l’image qu’une communauté existe encore et se construit par des petits gestes comme prendre du café et jouer au hockey. Ça rend la communauté accessible. C’est rassurant», songe M. Lanoue.
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Un hommage à Tim Horton, l’individu.
Artistes
Suffit de le dire, le Musée national du Tim Hortons peut être considéré comme une œuvre d’art. S’il avait à le catégoriser, Alexandre Contant estime qu’il pourrait s’inscrire dans le métamodernisme, un courant où l’approche ironique est utilisée pour faire passer un message.
Il s’agit aussi d’une œuvre participative, puisque les cofondateurs du musée invitent le public à donner ou prêter des objets. «On crée un espace où tout le monde peut être artiste aussi, dans un certain sens», avance l’instigateur du projet.
Des dons permettront d’alléger le fardeau fiscal du musée pour Lorie-Anne et Alexandre, qui disent avoir déjà investi plus de 700$ pour monter leur exposition permanente.
Un éventuel déménagement dans un bâtiment dédié exclusivement au musée n’est pas exclu de leurs plans futurs. Cet été, le couple souhaite d’ailleurs pèleriner jusqu’à Hamilton, en Ontario, pour visiter le premier Tim Hortons, maintenant devenu un musée officiel à saveur plus historique.
Vous pouvez organiser une visite gratuite du Musée national du Tim Hortons via sa page Facebook.